Comme il est de tradition, la revue aborde également les questions de langue et de littérature. La récente redécouverte d’une traduction par le poète et écrivain alsacien Oskar Wöhrle d’un très beau poème patriotique de Maironis du vivant de ce dernier nous a incités à nous intéresser à cette improbable rencontre poétique entre le prélat lituanien et le soldat allemand d’une puissance d’occupation en pleine guerre (1917-18) et à publier le poème dans ses trois versions linguistiques.
Enfin, la rédaction a voulu poursuivre le travail de recherche entamé dans le numéro précédent sur les richesses d’un recueil de daïnos sélectionnés par la folkloriste Gražina Krivickienė et illustrés par le peintre Viktoras Petravičius, paru en 1948 à Fribourg-en-Brisgau, à l’époque en zone d’occupation française. Cette fois, ce sont deux daïnos collectés par la folkloriste à Liudvinavas et Vilkaviškis, dans le sud-ouest de la Lituanie, qui sont présentés ici avec leur traduction en français. Ces chants populaires sont précédés d’un texte du poète d’origine lettone et historien de la littérature lituanienne Aleksis Rannit (1914-1985) sur leurs liens avec l’âme de la Lituanie. Rannit deviendra un membre éminent de l’Association internationale des critiques d’art (AICA) à sa création à Paris en 1950. Ils sont à nouveau accompagnés de très belles gravures de Viktoras Petravičius.
Quant à la première page de couverture, alors que la guerre a de nouveau éclaté en Europe, l’illustration choisie pour ce numéro reproduit l’incertitude que l’ancien empire russe cherche à imposer en tentant de retirer toute perspective d’avenir serein et libre à ses voisins. Elle est issue de la scénographie réalisée par Rasa Kriščiūnaitė-Kesminienė pour la pièce "Rapsodija Tamstai mokytojui" (Rhapsodie pour Monsieur le professeur) adaptée de Romualdas Granauskas et mise en scène par Olegas Kesminas au théâtre-studio "Palėpė" de Vilnius en 2022.