Entre musique et politique : portrait du député européen Vytautas Landsbergis
Le Parlement européen vient de publier sur son site une interview de Vytautas Landsbergis, professeur de musique et pianiste professionnel, grand spécialiste du compositeur M.K. Čiurlionis, qui joue aussi une partition plus politique, étant devenu député européen en 2004 après avoir marqué de son nom l’histoire de la Lituanie, ayant été la figure historique de l’indépendance du pays acquise en 1990, au moment de l’effondrement de l’Union soviétique. Derrière des piles de papiers dans son bureau, Vytautas Landsbergis répond à la question du passage de la vie d’artiste à la vie politique : « Le travail pédagogique de ma vie d’artiste -les cours et les examens- était aussi régulé que le travail politique peut l’être. Ici au Parlement, on peut choisir ses priorités, car nous manquons sans cesse de temps et on ne peut pas se consacrer à tous les sujets. Lorsque j’occupais une position politique importante en Lituanie, la précision et la gestion du temps étaient cruciaux. La créativité politique ne pouvait s’exprimer que de manière impromptue, improvisée ou pendant les heures nocturnes. » Pour Vytautas Landsbergis, « les talents nécessaires à la pratique musicale sont comparables à ceux nécessaires à la politique. Dans les deux cas, ils doivent être mentaux et physiques. On pense souvent aux capacités physiques lorsqu’on parle de musique ; or, la mémoire et l’imagination lors des représentations sont tout aussi importantes. On peut préparer un répertoire très connu pour un concert, sans forcément beaucoup répéter : la représentation est plus qu’une répétition. Au Parlement européen, on doit parfois se préparer à une réunion alors même qu’on y est ! C’est la même chose : il faut savoir être précis. » Concernant l’implication des institutions politiques dans le domaine de l’art, Vytautas Landsbergis pense que « se préoccuper des conditions d’exercice de la création artistique ne signifie pas systématiquement interférer. Cela dépend en fait beaucoup du régime politique. A l’époque communiste, nous vivions dans un régime qui interférait dans tous les domaines, dont les arts. Mais ce régime a rencontré d’insurmontables obstacles : malgré les décisions du Parti, qui distinguait par exemple la « bonne » et la « mauvaise » musique, l’art a poursuivi sa mutation. Le régime communiste a simplement fait perdre du temps aux artistes, et du potentiel créatif pour produire des âneries. L’interférence politique dans l’art est une erreur, mais lorsque des politiciens se soucient de l’expression artistique, ce n’est pas forcément de l’interférence ! » A ceux qui comparent l’Union européenne à l’Union soviétique en Lituanie, il répond que c’est « difficile de dialoguer avec des gens ignorants qui répètent des clichés avec aplomb. Ce genre de barrière mentale peut être abattu grâce à des faits, constatés sur le terrain : par exemple, en organisant des visites au sein des institutions européennes, en montrant comment les débats y sont menés. Les gens ont-ils oublié ce qu’était la dictature soviétique, ou bien sont-ils perdus dans les concepts ? L’URSS n’était pas une union mais une entité orwellienne falsifiée. Il n’y a jamais eu de socialisme -l’Etat est juste devenu un capitaliste exploitant et réprimant les travailleurs. Si une union est construite sans volonté commune ni liberté de choix, alors c’est un joug ! »
http://www.europarl.europa.eu/news/public/default_fr.htm
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Libellés : Ciurlionis, classique, Europe, Landsbergis, personnalités, politique
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