20 septembre 2008

Les lendemains n’ont pas chanté : tandem franco-lituanien à Metz

L’exposition You are my mirror 2 : les lendemains n’ont pas chanté met en relation l’histoire de la région Lorraine, parsemée de monuments commémoratifs issus de la guerre franco-allemande de 1870 avec l’histoire de la Lituanie et des nombreux "déboulonnages" des statues du régime communiste. L’exposition engage en premier lieu une réflexion sur le travail de mémoire. Contrairement aux monuments haussmanniens venant se hisser au bout des majestueuses perspectives des axes urbains ou même des monuments aux morts de 14-18 installés aux cœur des villages – en général à côté de l’église ou de la mairie –, ceux de la Lorraine ont été dispersés au fil des champs de bataille et se trouvent isolés, parfois invisibles, d’autres fois tronqués, le bronze des sculptures ayant servi aux canons de la guerre qui leur a succédé. A l’image de l’usure mnémonique, ces monuments – photographiés par Nicolas Pinier – ont peu à peu été relégués à l’arrière plan du paysage, oubli de leur localisation ou disparition derrière un massif d’arbres. Parallèlement, deux artistes lituaniens, Deimantas Narkevičius et Gintaras Didžiapetris sont mis à l’honneur et apportent un regard différent sur notre rapport à l’histoire. L’un, Deimantas Narkevičius, né en 1964, a vécu sous le régime communiste, l’autre, Gintaras Didžiapetris, né en 1985, n’en connaît que son effondrement graduel au profit d’une Lituanie européenne, deux générations de part et d’autre de l’effondrement de la frontière Ouest-Est. C'était une fois au XXe siècle, film de 8 min de Deimantas Narkevičius, 2004, se compose des archives de télévision ainsi que de rushs d’un reporter indépendant, documentant tous deux le démontage d’une statue de Lénine. L’événement se déroule dans un temps compté à rebours : on aperçoit la statue flotter le long du câble d’une grue puis, peu à peu, le corps imposant de cet ancien leader du parti retrouve pied sur le socle qui l’a porté de nombreuses années. "Ce n’est pas de nostalgie dont il est question dans cette œuvre, déclare Deimantas Narkevičius. Dans de nombreux pays de l’Europe de l’Est, certaines idées sociales, certains rêves et même certaines utopies manquent à beaucoup de gens. Alors que la réalité même de l’Union soviétique est en train d’être oubliée par la majorité des Européens de l’Est, les idées du socialisme apparaissent à nouveau comme une possible alternative à ce néo-libéralisme extrême." Si l’intention de l’artiste est de proposer une situation inverse à la réalité, où à la fin du film la foule semble applaudir l’inauguration du monument, l’œil occidental ne peut qu’être frappé par la "magie" de l’instant : Lénine, lourd de plusieurs tonnes, s’envolant dans le ciel, un bras tendu devant lui, flottant dans les airs à la hauteur des cimes des arbres, comme si l’idée du communisme qu’il incarnait était redevenue idée. Telle est bien la problématique issue de la mémoire, arracher le concept ou le souvenir du flux du réel afin de l’insérer dans un dispositif historique, politique, économique. Depuis le 4 juillet jusqu’au 19 octobre 2008. Entrée libre - du mercredi au dimanche de 12h à 19h - Frac Lorraine, 1 bis rue des Trinitaires, 57000 Metz. Renseignements : 03.87.74.20.02
http://www.fraclorraine.org/

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