10 mars 2008

La Grande Terreur et les Baltes

Il y a 70 ans, commençait en Union soviétique le plus grand massacre d’Etat jamais mis en oeuvre en Europe en temps de paix. En seize mois, d’août 1937 à novembre 1938, environ 750.000 citoyens soviétiques furent exécutés, soit près de 50.000 exécutions par mois, 1.600 par jour. La Grande Terreur – appelée Iejovschina en russe du nom du Commissaire du peuple à l’Intérieur, chef du NKVD, Nikolaï Iejov – est souvent présentée comme une attaque en règle de Staline comme les anciens dirigeants bolcheviques. En réalité, elle ne toucha qu’en partie les élites du régime, sous la forme de procès politiques à grand spectacle : les fameux Procès de Moscou. Ces évènements cachaient des opérations de masse qui visaient d’importantes couches de la société, considérées par le régime léniniste comme "ennemis du peuple" ou "éléments socialement nuisibles", ainsi que les "ennemis nationaux". Cette dernière catégorie est peu connue, hormis les actions anti-juives d’après 1945. Ainsi, une dizaine d’"opérations nationales" furent lancées par Staline et Iejov contre des minorités implantées à l’intérieur des frontières de l’URSS de l’époque, accusées d’être des "espions, des traîtres, des saboteurs, des terroristes". Entre septembre et novembre 1937, deux "opérations nationales" furent menées par le NKVD contre les Baltes : l’opération lettonne (16.600 exécutions au sein notamment des bataillons de Tirailleurs lettons ralliés au pouvoir bolchevique en 1918) et l’opération estonienne (4.700 exécutions parmi la minorité estonienne de la région de Pskov). Durant cette période, six autres "opérations nationales" ont également été menées contre d’autres minorités : l’opération polonaise (115.000 exécutions), l’opération allemande (42.000 exécutions), l’opération de Harbin (21.000 rapatriés de Mandchourie exécutés), l’opération grecque (9.500), l’opération finlandaise (5.700) et l’opération roumaine (4.000). Selon les statistiques centrales du NKVD, 247.157 personnes furent ainsi exécutées durant la Grande Terreur, après avoir été condamnées à mort par un tribunal d’exception à l’issue d’une parodie de jugement. Pour en savoir plus, cf. le livre de Nicolas Werth, Repenser la Grande Terreur, à paraître en 2008 aux éditions Gallimard.
http://www.gallimard.fr/

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