26 novembre 2006

Se venger de son passé sur Moscou ?

Qu’est-ce qui pousse la Pologne, soutenu en cela par la Lituanie, à bloquer le mandat de la Commission européenne pour ouvrir des négociations avec la Russie sur un nouvel accord de base ? Selon Alexander Rahr (photo), le spécialiste de la Russie à la Société allemande de politique étrangère (DGAP), "la raison principale de la démarche de Varsovie est le désir des Polonais de faire connaître à l’Union européenne leur attitude envers la Russie". Le plus grand risque est que, si l’accord de coopération et de partenariat n’est pas reconduit, l’UE et la Russie vont être obligées de le réécrire. Cela signifie que chaque pays de l’UE devra le faire ratifier par son parlement et ce processus pourrait durer des années. Depuis le dernier élargissement, les pays de l’Union européenne divergent de plus en plus fréquemment sur le facteur Russie. Les vieux membres de l’UE, à savoir l’Allemagne et la France, préconisent une approche stratégique des relations avec la Russie. Mais, selon A. Rahr, certains nouveaux membres, qui ont eu des relations particulières avec elle par le passé, ont apporté dans l’Union leurs "vieux démons", des souvenirs et plaies encore ouvertes de l’époque soviétique, voire de celle de l’Empire russe du XIXe siècle, ainsi que leurs problèmes intérieurs, et cherchent maintenant à se venger de leur passé sur Moscou. Certains Etats est-européens se fixent pour objectif principal d’isoler la Russie, de la pousser plus loin à l’est, dans les bras de la Chine, de renoncer à la coopération russo-européenne. La Pologne veut à présent renoncer à l’alliance énergétique. Varsovie estime que l’Union européenne peut stopper la construction du gazoduc de la Baltique sur lequel se sont entendues la Russie et l’Allemagne. Pourtant, la Russie, elle, bâtit une politique suffisamment judicieuse et avantageuse à l’égard de l’Union européenne. L’effet du blocage polonais est que Vladimir Poutine parle désormais moins avec l’ensemble de l’UE et mène un dialogue bilatéral avec les pays qui sont prêts à accepter la coopération la plus étroite avec la Russie : l’Allemagne, la France, l’Italie, la République Tchèque et la Hongrie. Pour pérenniser le succès acquis, le président russe pourrait proposer sa coopération aux républiques baltes. Et se déplacer dans ces pays au moins une fois afin de renforcer les positions russes et obtenir davantage de confiance. Selon Vladimir Tchijov, représentant permanent de la Russie auprès de l’UE, "c’est une tentative de chantage, mais pas contre la Russie. Contre les autres membres de l’Union européenne. Nous ne voyons aucune raison de prendre des contre-mesures. C’est à l’Union européenne de statuer sur la décision de l’un ou de l’autre de ses membres".
http://www.dgap.org/fi/mitarbeiter/rahr.html

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