12 août 2013

Dubois de Montperreux (1798-1850), un naturaliste suisse sur les terres de l’ancienne République des Deux Nations

C’est à Berlin et en français que parut en 1831 l’ouvrage "Conchiologie fossile et aperçu géognostique des formations du plateau wolhynie-podolien". L’auteur, le Neuchâtelois Frédéric Dubois de Montperreux (orthographié parfois Montpéreux), en se fondant sur les travaux d’Alexandre Brongniart et de paléontologues allemands, considéra que cette région de l’Europe était particulièrement intéressante pour la géologie bien qu’elle restât peu connue des savants. L’ouvrage s’est révélé le résultat d’un des plus importants travaux de géologie et de paléontologie sur l’Ukraine au XIXe siècle. Il comprend la description de plus d’une dizaine des unités lithostratigraphiques, de nombreuses descriptions des mollusques fossiles et une comparaison avec les faunes atlantique et méditerranéenne. Le parcours de l’auteur, un naturaliste talentueux mais privé des moyens, obligé d’émigrer à l’étranger en l’occurrence dans les provinces baltes de l’empire de Russie, constitue un exemple assez typique chez de nombreux précepteurs de français mais relativement rare chez les naturalistes. En 1819, Dubois de Montperreux trouva un emploi chez un Germano-Balte fortuné, Ferdinand Ropp (1779-1844), qui habitait à Mittau (aujourd’hui Jelgava, en Lettonie). Il y enseigna le français à ses enfants. Il profita du fait que la famille Ropp possédait par ailleurs une riche bibliothèque et une grande collection d’objets d’art, dont une grande partie provenait d’achats à Paris sur le marché noir des objets pillés par les troupes françaises en Italie durant la Révolution et sous l’Empire. Le jeune précepteur suisse était un autodidacte particulièrement doué, tant dans le domaine de l’art que dans celui des sciences naturelles. Après deux ans, il partit pour Pokroje (aujourd’hui Pakruojis, en Lituanie), une autre demeure de la famille Ropp. Il s’y fit fait connaître comme un dessinateur et un architecte doué en dirigeant les travaux de rénovation du château et de son parc. En 1829, après huit ans passés au service de la famille Ropp, Dubois de Montperreux partit sur les terres méridionales de l’ancienne République des Deux Nations, afin d’étudier la géologie de Volhynie et de Podolie. A la fin de son séjour, il accepta la proposition d’accompagner à Berlin en tant que secrétaire un jeune aristocrate, Alexandre Raciborowski. Il profita de cette occasion pour étudier chez l’helléniste Auguste Boeckh (1785-1867) et le géographe Carl Ritter (1779-1859). Cependant, ce sont les naturalistes Alexandre von Humboldt (1769-1859) et Leopold von Buch (1774-1853) qui ont joué un rôle particulièrement important dans sa formation. Ils furent aussi à l’origine de l’idée d’un nouveau voyage scientifique dans le Caucase. C’est en Lituanie, dans le domaine des Ropp, que Dubois de Montperreux rédigea l’ouvrage sur cette expédition. Parue en six volumes et complétée d’un atlas, la publication fut couronnée à Paris par le prix de la Société de Géographie, et à Saint-Pétersbourg par l’ordre de Saint Stanislas remis par le tsar. En 1839, le naturaliste retourna en Suisse où il enseigna l’archéologie à l’Académie de Neuchâtel. En 1848, il fit don à l’université de Zürich de sa collection, dont une grande partie des objets naturalistes et ethnologiques est originaire de Lituanie, de Volhynie et de Podolie. Frédéric Dubois de Montperreux mourut peu après en 1850. Pour en savoir plus, contacter Piotr Daszkiewicz, historien des sciences, Muséum national d’histoire naturelle à Paris : piotrdas@mnhn.fr

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