01 juin 2013

Antoine Gouan (1733-1821) et les sciences naturelles en Lituanie


Antoine Gouan fut un de plus importants naturalistes d’Europe au tournant du XVIIIe et du XIXe siècles. Médecin formé à Montpellier, il resta toute sa vie liée à cette ville. Il marqua l’histoire des sciences naturelles par ses travaux en botanique dont Hortus regius monspeliensis et Flora Monspeliac, mais aussi en ichtyologie dont Historia Piscicum. Correspondant de Carl Linné (1707-1778), il a eu le grand mérite d’introduire en France le système de la nomenclature fondé par ce savant suédois, système qu’on utilise encore aujourd’hui. Bien qu’il ne se soit jamais rendu dans la République des Deux Nations, il a pourtant joué un rôle prépondérant pour les sciences naturelles en Lituanie. Nous ne savons pas exactement quand ont commencé ni de quelle nature étaient ses relations avec le roi et grand-duc Stanislas Auguste Poniatowski et avec son entourage. On peut supposer que c’est Albrecht von Haller (1708-1777), grand naturaliste et médecin suisse, très estimé par le souverain, et en même temps correspondant de Gouan, qui est à l’origine de l’estime dont le naturaliste de Montpellier jouissait dans l’Union polono-lituanienne. D’autres hypothèses ne sont pas à exclure, car Gouan correspondait notamment avec Jean-Jacques Rousseau (1712-1778), l’auteur des Considérations sur le gouvernement de Pologne. Stanislas Poniatowski le voyait comme un candidat idéal pour enseigner les sciences naturelles et la médecine, ainsi que pour organiser un jardin botanique en Lituanie. Cependant, Gouan ne voulut pas quitter Montpellier et désigna son ancien élève et ami Jean-Emmanuel Gilibert (1741-1814). Rappelons que c’est ce dernier qui organisa les jardins botaniques à Grodno et à Vilna, en prenant Montpellier pour modèle. Le rôle de Gouan pour les sciences en République des Deux Nations est donc plus important que les simples conseils donnés à Poniatowski. Le souverain acheta l’herbier de ce naturaliste afin d’organiser un cabinet d’Histoire naturelle et donner un outil pour les études de la botanique en Lituanie. La Bibliothèque centrale du Muséum national d’Histoire naturelle à Paris conserve la correspondance de Gouan avec Isidore Picot de Lapeyrouse (1744-1818) au sujet d’envoi de cet herbier à Grodno. Les célèbres plaques de cuivre de Pierre Richer de Belleval (1555-1632) furent également achetées et envoyées en Lituanie. Ces cuivres, longtemps considérés comme perdus, ont représenté environs quatre cents espèces végétales. Les rares tirages furent considérés comme une prouesse par les plus grands naturalistes du XVIIIe siècle. Gilibert -probablement grâce à Gouan- les retrouva à Montpellier et les acheta sur le compte de Poniatowski. Le roi les admira durant sa visite à Grodno. Gilibert avait le projet de les utiliser pour un grand ouvrage de botanique. Cependant, c’est Gouan qui détermina les plantes et fit un énorme travail en établissant une nomenclature récente et la synonymie avec les noms des autres auteurs. Ce travail lui prit 14 ans. Généreusement, il l’offrit à Gilibert. Ce dernier réussit à publier en République des Deux Nations une partie des cuivres (environs 60) des espèces dont il confirma la présence en Lituanie. Nous pouvons donc supposer qu’Antoine Gouan a contribué de manière significative à la réalisation de la première Flore de Lituanie Exercita phytologica, seu Flora Lithuanica. Pour en savoir plus, contacter Piotr Daszkiewicz, historien des sciences, Muséum national d’histoire naturelle à Paris :
piotrdas@mnhn.fr



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