Correspondance du biologiste Edward Janczewski (1846-1918) avec les Français Edouard Bornet et Joseph Decaisne
Edward Janczewski (Edvardas Jančevskis) est né en 1846 à Blinstrubiszki (Blinstrubiškiai), près de Raseiniai en Samogitie. Après avoir terminé le lycée à Vilnius, il continua ses études à Cracovie et à Saint-Pétersbourg. En 1872, il obtint son doctorat à l’université de Halle où il étudia sous la direction d’Anton de Bary (1831-1888), pionnier dans l’étude des algues et futur professeur et recteur de l’université de Strasbourg. Janczewski collabora avec de Bary jusqu’à la mort de ce grand botaniste allemand. Son intérêt pour la biologie des algues est à l’origine d’une longue amitié avec Edouard Bornet (1828-1911), grand algologue français.
Les travaux sur les algues maritimes, leur systématique, leur biologie et leur reproduction, les expériences génétiques sur les anémones - menées avant la redécouverte des travaux de Mendel -, sa ”Monographie des groseilles” et ses travaux sur l’anatomie et la physiologie des racines placent Janczewski au rang des plus importants botanistes de l’Europe centrale de l’époque. Il fut membre de diverses sociétés savantes et recteur de l’université Jagellonne de Cracovie. Marié à Jadwiga Szetkiewicz (1856-1941), Janczewski était le beau-frère de l’écrivain Henryk Sienkiewicz, prix Nobel de littérature en 1905. Il s’intéressait d’ailleurs vivement à la littérature : sa famille entretenait des relations amicales avec Maironis, et gardait aussi précieusement qu’une relique un portrait du grand poète Adam Mickiewicz, peint par Walenty Wańkowicz.
Francophone et francophile, Janczewski avait de nombreux liens avec la France. C’est à Cherbourg et à Antibes qu’il chercha les algues pour ses études. Il travailla sur l’herbier du Muséum national d’Histoire naturelle de Paris. Il publia une grande partie de ses articles dans les revues scientifiques françaises. Il équipa son laboratoire à Cracovie en appareils achetés à Paris et surtout en microscopes de Nachet.
La bibliothèque botanique du Muséum à Paris et l’Institut de France conservent une riche collection de lettres de Janczewski, principalement adressées à Bornet et à Descaisne. Une grande majorité des lettres traitent de ses recherches, et plus particulièrement sur les algues, la physiologie des racines et l’hérédité des plantes.
Sujet de l’Empire austro-hongrois, Janczewski garda des liens avec la Lituanie. Il passait toutes ses vacances dans les biens de sa famille. Fils d’un philarète et prisonnier politique, il évoquait parfois dans ses lettres des sujets politiques. Le 22 juin 1887, il écrivit de Cracovie à Bornet : ”Vous connaissez peut-être la nouvelle mesure du gouvernement russe qui supprime le droit d’héritier de biens immeubles situés dans les provinces polonaises à tous les sujets étrangers. Cela équivaut presque à la confiscation. Ainsi qu’une foule de mes concitoyens, je suis bien atteint par cette mesure barbare car le bien de ma mère est situé en Lituanie”. Les évènements de 1905 trouvèrent écho dans ses lettres ; il écrivit le 20 avril 1905 : “Vous lisez bien les journaux et vous trouverez au courant des évènements dans l’empire des Tsars qui nous touchent de si près. Peut-être que le joug sous lequel nous avons vécu plus d’un siècle deviendra plus supportable, car dans la société indépendante russe se font déjà entendre des voix que la justice nous doit être faite, bien que cela ne conviendrait nullement aux Prussiens. Quelle tournure prendra la révolution en Russie, accomplie dans les esprits des classes civilisée, c’est aussi difficile de prévoir comme l’été, il y a un an, les résultats de la guerre et leurs conséquences”. Il perdit pourtant rapidement espoir et écrivit le 21 décembre 1905 : ”Vous comprenez bien que nous vivons depuis un an dans un état de surexcitation, entre deux terrorismes, l’un moscovite tsariste, l’autre révolutionnaire socialiste, et attendons toujours l’amélioration de nos destinés, en tremblant tous les jours pour tout et tous qui nous sont chers”.
Cette correspondance met aussi en évidence son grand mérite pour l’horticulture en Lituanie, qui lui doit l’introduction de nombreuses variétés de tulipes, glaïeuls, jacinthes, lys et fraisiers. Dans une lettre adressée à Joseph Decaisne (1807-1882) - à l’époque responsable du service des cultures au Muséum de Paris - et datée du 11 février 1879, Janczewski demanda à ce que lui soit envoyé ”au docteur Switzyn à Kowno” douze variétés de poires, sept de pommes, quatre de prunes et deux de cerises afin de les acclimater dans les biens de sa famille. Pour en savoir plus : Piotr Daszkiewicz, Muséum national d’Histoire naturelle à Paris :
piotrdas@mnhn.fr
Les travaux sur les algues maritimes, leur systématique, leur biologie et leur reproduction, les expériences génétiques sur les anémones - menées avant la redécouverte des travaux de Mendel -, sa ”Monographie des groseilles” et ses travaux sur l’anatomie et la physiologie des racines placent Janczewski au rang des plus importants botanistes de l’Europe centrale de l’époque. Il fut membre de diverses sociétés savantes et recteur de l’université Jagellonne de Cracovie. Marié à Jadwiga Szetkiewicz (1856-1941), Janczewski était le beau-frère de l’écrivain Henryk Sienkiewicz, prix Nobel de littérature en 1905. Il s’intéressait d’ailleurs vivement à la littérature : sa famille entretenait des relations amicales avec Maironis, et gardait aussi précieusement qu’une relique un portrait du grand poète Adam Mickiewicz, peint par Walenty Wańkowicz.
Francophone et francophile, Janczewski avait de nombreux liens avec la France. C’est à Cherbourg et à Antibes qu’il chercha les algues pour ses études. Il travailla sur l’herbier du Muséum national d’Histoire naturelle de Paris. Il publia une grande partie de ses articles dans les revues scientifiques françaises. Il équipa son laboratoire à Cracovie en appareils achetés à Paris et surtout en microscopes de Nachet.
La bibliothèque botanique du Muséum à Paris et l’Institut de France conservent une riche collection de lettres de Janczewski, principalement adressées à Bornet et à Descaisne. Une grande majorité des lettres traitent de ses recherches, et plus particulièrement sur les algues, la physiologie des racines et l’hérédité des plantes.
Sujet de l’Empire austro-hongrois, Janczewski garda des liens avec la Lituanie. Il passait toutes ses vacances dans les biens de sa famille. Fils d’un philarète et prisonnier politique, il évoquait parfois dans ses lettres des sujets politiques. Le 22 juin 1887, il écrivit de Cracovie à Bornet : ”Vous connaissez peut-être la nouvelle mesure du gouvernement russe qui supprime le droit d’héritier de biens immeubles situés dans les provinces polonaises à tous les sujets étrangers. Cela équivaut presque à la confiscation. Ainsi qu’une foule de mes concitoyens, je suis bien atteint par cette mesure barbare car le bien de ma mère est situé en Lituanie”. Les évènements de 1905 trouvèrent écho dans ses lettres ; il écrivit le 20 avril 1905 : “Vous lisez bien les journaux et vous trouverez au courant des évènements dans l’empire des Tsars qui nous touchent de si près. Peut-être que le joug sous lequel nous avons vécu plus d’un siècle deviendra plus supportable, car dans la société indépendante russe se font déjà entendre des voix que la justice nous doit être faite, bien que cela ne conviendrait nullement aux Prussiens. Quelle tournure prendra la révolution en Russie, accomplie dans les esprits des classes civilisée, c’est aussi difficile de prévoir comme l’été, il y a un an, les résultats de la guerre et leurs conséquences”. Il perdit pourtant rapidement espoir et écrivit le 21 décembre 1905 : ”Vous comprenez bien que nous vivons depuis un an dans un état de surexcitation, entre deux terrorismes, l’un moscovite tsariste, l’autre révolutionnaire socialiste, et attendons toujours l’amélioration de nos destinés, en tremblant tous les jours pour tout et tous qui nous sont chers”.
Cette correspondance met aussi en évidence son grand mérite pour l’horticulture en Lituanie, qui lui doit l’introduction de nombreuses variétés de tulipes, glaïeuls, jacinthes, lys et fraisiers. Dans une lettre adressée à Joseph Decaisne (1807-1882) - à l’époque responsable du service des cultures au Muséum de Paris - et datée du 11 février 1879, Janczewski demanda à ce que lui soit envoyé ”au docteur Switzyn à Kowno” douze variétés de poires, sept de pommes, quatre de prunes et deux de cerises afin de les acclimater dans les biens de sa famille. Pour en savoir plus : Piotr Daszkiewicz, Muséum national d’Histoire naturelle à Paris :
piotrdas@mnhn.fr
Libellés : biologie, Daszkiewicz, Mickiewicz, nature, Raseiniai, science/2
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