09 janvier 2015

L’insurrection de 1794 à Vilnius vue par le général Michał Sokolnicki (1760-1816)

Le Service historique de la Défense à Vincennes conserve de nombreux documents de l’époque napoléonienne, dont ceux des campagnes en Pologne et en Lituanie ainsi qu’une partie de la documentation des Légions en Italie – unités constituées par les réfugiés de l’ancienne République des Deux Nations désirant libérer leur patrie. Parmi ces documents se trouvent les écrits et les rapports du général Sokolnicki qui, après avoir commandé l’école des officiers de génie à Vilnius, dirigea un régiment d’insurgés en 1794. Emprisonné par les Russes, puis libéré, Sokolnicki rejoignit la France pour continuer son combat. Il devint aide de camp de Napoléon et l’un des plus importants officiers de la Grande Armée. Dans divers rapports et écrits, il tenta de prévenir les autorités françaises du danger de la Russie. En 1811, avant l’offensive française de 1812, il prépara un important rapport sur les forces et faiblesses de l’empire du tsar. Afin d’illustrer le comportement de la population de Lituanie et de Pologne, Sokolnicki cita plusieurs épisodes de l’insurrection de 1794. Un épisode du début de ce soulèvement à Vilnius illustrait l’unité des Lituaniens de diverses classes sociales face à l’ennemi commun : A Vilna, l’insurrection avait été concertée, ménagée et calculée plus d’un mois avant son explosion, au milieu de plus de trois cent individus de toutes les classes ; de ce nombre étoient des professeurs et des étudiants de l’université, des chanoines de la Cathédrale, des curés, des moines, des négociants, des Juifs, des fabricants, des militaires, ainsi que les premiers Magnats du Pays, et jusqu’à des femmes. Les Russes redoublaient la surveillance. Cependant le secret fut religieusement gardé et, en un instant, toute la garnison avec son état-major général fut faite prisonnière; ceux qui cherchèrent à s’évader, furent poursuivis et massacrés par des paysans des environs. Et un seul exemple de punition opéré sur le champ contre un traitre à la patrie suffit pour rétablir l’ordre que partout ailleurs on n’eut pu obtenir peut-être d’une émeute populaire.
Pour en savoir plus, contacter Piotr Daszkiewicz :
piotrdas@mnhn.fr

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20 octobre 2014

Quatre glaives unis, de la Baltique à la mer Noire

La Banque nationale d'Ukraine vient de mettre en circulation 30 000 exemplaires d’une pièce commémorative de 5 grivnas afin de commémorer le 500e anniversaire de la bataille d’Orcha de 1514. Cette victoire de l’armée du grand-duché de Lituanie, qui unissait des troupes lituaniennes, polonaises, ukrainiennes et biélorusses sous le commandement du magnat Constantin Ostrogski (1460-1530), permit d'arrêter l'offensive des armées du grand-prince Vassili III de Moscou. La bataille se déroula à Orcha, aujourd’hui en Biélorussie, dans le contexte de la guerre russo-lituanienne de 1512-1522. Le côté face de la pièce représente quatre glaives qui symbolisent l'union militaire des quatre peuples - lituanien, polonais, biélorusse et ukrainien. Le revers comprend des images symbolisant la bataille d'Orcha, ainsi qu'un portrait de Constantin Ostrogski (Konstantinas Ostrogiškis), premier grand hetman du grand-duché de Lituanie. Voïvode de Trakai et châtelain de Vilnius, Ostrogski était aussi un défenseur de la langue ruthénienne et est aujourd’hui considéré comme un des précurseurs de la langue biélorusse. Très croyant, il donna généreusement pour la construction de nombreuses églises orthodoxes et d’écoles. En Ukraine occidentale la ville de Starokostiantyniv, créée par lui, porte toujours son nom.
http://www.bank.gov.ua/control/en/currentmoney/cmcoin/details?coin_id=649

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01 juillet 2013

Une histoire pour comprendre la Lituanie !


A l’occasion de la Présidence lituanienne du Conseil de l’Union européenne (2e semestre 2013), une Histoire de la Lituanie paraît aujourd’hui en six langues, sous la plume de quatre éminents spécialistes, Alfonsas Eidintas, Alfredas Bumblauskas, Antanas Kulakauskas et Mindaugas Tamošaitis. Publié aux éditions Eugrimas, ce livre essaie, selon le dossier de presse, "de proposer une réponse à une des questions les plus importantes pour le peuple lituanien : comment est née la Lituanie et pourquoi cet État est, non pas l’expression du hasard ou de circonstances secondaires, mais un fruit mûri durant des siècles, le chemin d’une indépendance fondée sur la détermination légitime du peuple lituanien et la récompense légitime et bien méritée pour chaque Lituanien !"
http://www.eu2013.lt/en/History-of-Lithuania-Book
http://www.ebooksbylanguage.com/fr/ebook/histoire-de-la-lituanie/

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01 juin 2013

Antoine Gouan (1733-1821) et les sciences naturelles en Lituanie


Antoine Gouan fut un de plus importants naturalistes d’Europe au tournant du XVIIIe et du XIXe siècles. Médecin formé à Montpellier, il resta toute sa vie liée à cette ville. Il marqua l’histoire des sciences naturelles par ses travaux en botanique dont Hortus regius monspeliensis et Flora Monspeliac, mais aussi en ichtyologie dont Historia Piscicum. Correspondant de Carl Linné (1707-1778), il a eu le grand mérite d’introduire en France le système de la nomenclature fondé par ce savant suédois, système qu’on utilise encore aujourd’hui. Bien qu’il ne se soit jamais rendu dans la République des Deux Nations, il a pourtant joué un rôle prépondérant pour les sciences naturelles en Lituanie. Nous ne savons pas exactement quand ont commencé ni de quelle nature étaient ses relations avec le roi et grand-duc Stanislas Auguste Poniatowski et avec son entourage. On peut supposer que c’est Albrecht von Haller (1708-1777), grand naturaliste et médecin suisse, très estimé par le souverain, et en même temps correspondant de Gouan, qui est à l’origine de l’estime dont le naturaliste de Montpellier jouissait dans l’Union polono-lituanienne. D’autres hypothèses ne sont pas à exclure, car Gouan correspondait notamment avec Jean-Jacques Rousseau (1712-1778), l’auteur des Considérations sur le gouvernement de Pologne. Stanislas Poniatowski le voyait comme un candidat idéal pour enseigner les sciences naturelles et la médecine, ainsi que pour organiser un jardin botanique en Lituanie. Cependant, Gouan ne voulut pas quitter Montpellier et désigna son ancien élève et ami Jean-Emmanuel Gilibert (1741-1814). Rappelons que c’est ce dernier qui organisa les jardins botaniques à Grodno et à Vilna, en prenant Montpellier pour modèle. Le rôle de Gouan pour les sciences en République des Deux Nations est donc plus important que les simples conseils donnés à Poniatowski. Le souverain acheta l’herbier de ce naturaliste afin d’organiser un cabinet d’Histoire naturelle et donner un outil pour les études de la botanique en Lituanie. La Bibliothèque centrale du Muséum national d’Histoire naturelle à Paris conserve la correspondance de Gouan avec Isidore Picot de Lapeyrouse (1744-1818) au sujet d’envoi de cet herbier à Grodno. Les célèbres plaques de cuivre de Pierre Richer de Belleval (1555-1632) furent également achetées et envoyées en Lituanie. Ces cuivres, longtemps considérés comme perdus, ont représenté environs quatre cents espèces végétales. Les rares tirages furent considérés comme une prouesse par les plus grands naturalistes du XVIIIe siècle. Gilibert -probablement grâce à Gouan- les retrouva à Montpellier et les acheta sur le compte de Poniatowski. Le roi les admira durant sa visite à Grodno. Gilibert avait le projet de les utiliser pour un grand ouvrage de botanique. Cependant, c’est Gouan qui détermina les plantes et fit un énorme travail en établissant une nomenclature récente et la synonymie avec les noms des autres auteurs. Ce travail lui prit 14 ans. Généreusement, il l’offrit à Gilibert. Ce dernier réussit à publier en République des Deux Nations une partie des cuivres (environs 60) des espèces dont il confirma la présence en Lituanie. Nous pouvons donc supposer qu’Antoine Gouan a contribué de manière significative à la réalisation de la première Flore de Lituanie Exercita phytologica, seu Flora Lithuanica. Pour en savoir plus, contacter Piotr Daszkiewicz, historien des sciences, Muséum national d’histoire naturelle à Paris :
piotrdas@mnhn.fr



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15 mai 2013

"Espérons qu'il sera parmi nous la prochaine fois"


En 1795, lors du troisième et dernier partage de la Pologne-Lituanie entre la Russie, l'Autriche et la Prusse, la plupart des autres Etats européens acceptèrent cette partition sans grande protestation. Sauf l'Empire ottoman ! Pendant de nombreuses années, à chaque réception officielle d'ambassadeurs étrangers à la cour de la Sublime Porte, était annoncé à haute voix : "Le nonce de Lekhistan (Pologne-Lituanie) n'est pas encore arrivé". Et les Sultans répondaient sur un ton solennel : "Espérons qu'il sera parmi nous la prochaine fois".

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13 mars 2013

La Lituanie dans le livre d’un forestier britannique du XIXe siècle

John Croumbie Brown (1808-1895) fut un naturaliste renommé, connu pour ses travaux au Cap de Bonne Espérance et professeur de botanique au South African College. D’origine écossaise, il était révérend de l’église presbytérienne. Ses fonctions religieuses, ainsi que son intérêt pour la science, sont à l’origine de nombreux voyages. Il est connu pour avoir été un véritable pionnier des sciences forestières dans les pays anglophones. En 1877, il adressa, au Conseil municipal d’Edinburgh et au Royal Scottish Arboricultural Society, un projet d’organisation de l’enseignement forestier à l’université et un arboretum. Lors de ses voyages, il étudia et compara diverses traditions et méthodes de gestion forestière. Il fut aussi l’un des premiers à découvrir une relation entre la politique forestière et les changements climatiques. Brown avait de nombreux liens avec la France. Membre de diverses sociétés savantes, il fut l’auteur de publications sur l’ordonnance forestière de 1669 de Colbert et sur les plantations des pins sylvestres en France. C’est à lui que le monde anglophone doit la découverte des travaux de Pierre André de Vilmorin (1766-1862) et la reconnaissance de l’importance de l’école forestière française. Les voyages de recherches ont amené ce scientifique également en Lituanie et en Pologne. En 1885, il publia "Forest and Forestry in Poland, Lithuania, The Ukraine and the Baltic Provinces of Russia with notice of the export of timber from Memel, Dantzig, and Riga". Ce livre est non seulement une importante description de l’économie forestière (avec des remarques sur les lois forestières datant de XIVe siècle) et de l’agriculture. C’est aussi une précieuse source pour l’histoire. Brown nota plusieurs observations sur la société de l’époque, les coutumes, la culture et surtout sur l’administration tsariste qui lui était, par ailleurs, peu sympathique. Plusieurs dizaines de pages de cet ouvrage sont dédiées à l’histoire de la Lituanie et de la Pologne. Bien évidemment, ces fragments ne sont qu’une compilation de diverses sources historiques. Cependant, elles jouèrent probablement un rôle important en faveur de la popularisation des connaissances en langue anglaise sur l’histoire de ces pays ; d’autant plus qu’elles étaient lues par des cercles différents de lecteurs, y compris les amateurs de livres historiques et politiques. Les nombreuses remarques de Brown viennent néanmoins de ses propres observations ou de témoignages directs de personnes qu’il a rencontrées. Notons des fragments sur l’insurrection de 1863, son admiration pour l’indépendance des paysans lituaniens qui, même pendant des périodes de disette, refusaient l’aide du gouvernement russe ou encore ses notes sur le nombre de déportés polonais et lituaniens en Sibérie (il l’estimait par le nombre de demandes du Nouveau Testament) et leurs rôle pour le développement économique de cette région. Pour en savoir plus, contacter Piotr Daszkiewicz, Muséum national d’histoire naturelle à Paris :
piotrdas@mnhn.fr

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